Antoine et Juan, deux ans de passion argentine

Mieux qu’une carte postale de votre tante ou un mail de votre meilleur pote, la série « Les Vacances de l’amour » de Gizèle, vous emporte dans la moiteur torride du sexe à l’étranger. À cheval entre le témoignage et le carnet de route, plongez dans nos voyages coquins, ceux qui tombent à l’eau comme ceux qui finissent bien. Cette semaine, Antoine nous raconte sa passion avec Juan, un Colombien rencontré à Buenos Aires il y a quelques années.

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Avant de vous raconter cette histoire, sachez que société colombienne est très conservatrice, en particulier sur la question de l’homosexualité. De leur côté, les Argentins ont la réputation d’être assez jaloux et possessifs. Fait étrange mais notable : au cours de mes séjours en Amérique latine, j’ai croisé plusieurs Colombiens gays qui se comportaient comme des machos. Certains étaient du genre à faire remarquer à leur mec que son short était trop court pour sortir. J’avoue que je n’aurais jamais pensé entendre ça un jour de la part d’un mec homo.

 

« J’ai passé un an à Buenos Aires entre mes deux années de master à Paris. C’est là que j’ai rencontré Juan. Il était Colombien et il vivait depuis plus de trois ans en Argentine. C’était un garçon à l’allure soignée, au style vestimentaire plutôt classique. Quand je l’ai vu pour la première fois, il avait 23 ans mais il en paraissait beaucoup plus. Il aimait d’ailleurs mettre en avant sa maturité et il paraissait très sérieux et très cultivé au premier abord. Juan était le genre de mec à aimer briller en société. Il rivalisait de blagues et de bons mots, on voyait qu’il voulait être au centre de l’attention.

Nous nous sommes rencontrés via un ami français lors d’un déjeuner en Uruguay. C’était à Maldonado, la ville voisine de Punta del Este, qualifiée de « Saint-Tropez uruguayen » par les guides touristiques. Maldonado était juste une étape dans un voyage en stop que je faisais le long de la côte uruguayenne. Juan se trouvait là car il travaillait dans un resto chic de Punta del Este, histoire de se faire un peu d’argent. C’était la veille de Noël. Ce jour-là, je ne l’ai pas tellement calculé. J’étais déjà en couple avec un garçon, à Paris, et je me trouvais avant tout en Uruguay pour rendre visite à mon pote français. Nous sommes allés tous ensemble à la plage et je ne me souviens pas avoir ressenti d’attirance particulière pour Juan. En revanche, mon pote m’a raconté que ce jour-là, Juan m’avait clairement repéré. Au terme de cette journée, nous avons échangé nos adresses mail puis j’ai repris la route. Peu de temps après, Juan a commencé à m’écrire. Nous parlions de temps en temps sur Facebook et finalement, nous nous sommes vus à son retour à Buenos Aires.

 

Ce jour-là, je l’ai rejoint dans un bar et j’ai rencontré ses amis. Nous étions sur le toit-terrasse d’un bar et nous avons vidé plusieurs pichets de bière. Au moment de partir, passablement alcoolisés, Juan et moi nous sommes embrassés. Sur le chemin du retour, je me souviens lui avoir pris la main, ce qui n’est pas forcément d’usage dans la culture gay locale. Buenos Aires revendique son côté gay-friendly mais les signes d’affection dans la rue ne sont pas monnaie courante. La preuve, un mec en voiture a crié « puto ! » ( pédé). Je me suis retourné et j’ai crié en retour sans réfléchir « orgulloso !» (fier). J’étais surpris d’avoir eu ce réflexe. Juan a été impressionné. Puis nous sommes rentrés chez lui.

 

Tout le monde parle du sexe avec les Latinos comme d’un truc ultratorride

 

Tout le monde parle du sexe avec les Latinos comme d’un truc ultratorride, très enflammé et passionné. J’avais pu confirmer ça quelque temps avant avec un Vénézuélien (j’avoue avoir un gros penchant pour le style caribéen). Donc au lit avec Juan, je m’attendais à quelque chose de complétement débridé et d’insatiable, comme j’avais pu connaître jusqu’alors. Mais avec lui, la légende caribéenne ne s’est pas du tout vérifiée ! Pour être honnête, c’était même un peu ennuyeux. Juan n’était pas le meilleur du coup au monde. Pourtant dans la vie, il ne lésinait pas sur les preuves d’amour. Pour un Français, l’amour latino peut d’ailleurs être super kistch. Avec Juan, j’ai échappé à ça mais beaucoup de mes potes ont droit à une profusion de peluches, de ballons en forme de cœur, de messages dégoulinant de niaiseries, de déclarations enflammées et improbables. J’ai l’impression qu’en matière d’amour, les Latinos, sont beaucoup moins désabusés que les Français. En général, ils sont même assez fleur bleue. Ça surprend !

 

Ensemble, Juan et moi parlions exclusivement en espagnol. Je crois que que l’on ne se rend pas forcément compte de ce que l’on dit quand on parle une langue étrangère. Pour moi, c’est moins grave de dire certaines choses en espagnol, alors qu’en français, il y a des expressions qui me paraissent beaucoup plus chargées de sens. Ici, la boulangère va facilement te dire « mi amor » quand elle te demande ce que tu souhaites. Du coup, les mots d’amour paraissent plus banals. On se dit facilement « te quiero » (je t’aime) entre potes, par exemple. Pour autant, c’est moi qui ai dit « Je t’aime » à Juan en premier, alors que j’étais rentré à Paris. C’était un soir sur Skype. Je me souviens avoir prononcé la phrase en espagnol. Je me suis rendu compte après coup qu’il a dû le prendre avec beaucoup plus de gravité que moi. La première fois que je lui ai dit « Je t’aime » en français, là pour moi, c’était différent. Déjà, c’était à Buenos Aires, en tête-à-tête, et puis je mettais plus de signification derrière les mots car je les prononçais dans ma langue maternelle.

Finalement, nous nous sommes vraiment mis ensemble quand je suis revenu faire mon stage à Buenos Aires l’année suivante. J’avais largué mon ex, j’avais fait mon coming out auprès de mes parents. Bref, j’étais prêt ! Le truc, c’est que l’on a (trop) rapidement vécu tous les deux. Notre cohabitation a duré cinq mois. Le temps d’un naufrage. Un jour, Juan m’a dit que notre histoire était terminée. J’ai pris mes affaires et je me suis barré. « Ya fue », comme on dit ici. Ça veut dire « Voilà, c’est fait, on passe à autre chose. » Au total, l’histoire aura donc duré un peu plus de deux ans. Après l’annonce de Juan, j’ai vécu chez des potes pendant plusieurs mois. C’était une rupture assez classique, à la différence près que je me retrouvais à 15.000 kilomètres de chez moi et qu’il fallait gérer la douleur différemment que lorsque tu as ta famille ou tes potes d’enfance à tes côtés. Par chance, je me suis rendu compte que je m’étais fait de vrais amis ici, sur lesquels je pouvais compter.

 

Malgré la rupture, je ne regrette pas mon histoire avec Juan. Ça n’a pas marché avec lui, c’est tout. Et puis, ça m’a fait réfléchir. Je pense qu’en voyage, surtout quand on voyage tout seul, on est plus disposé à rencontrer des gens différents et donc à coucher avec des autochtones (même si ce n’est pas vraiment raisonnable comme le dit Gizèle dans son article !). On peut se libérer de certains préjugés, notamment sociaux. Et puis il y a toujours quelque chose d’excitant et d’exotique à coucher avec quelqu’un qui n’est pas de la même nationalité que soi. Ça marche d’ailleurs dans les deux sens. Je suis grand et blond, je dois moi aussi paraître très exotique aux yeux d’un Sud-Américain. Malgré tout, je me dis parfois que j’aimerais sortir avec un Français, que cela doit être plus facile. Les malentendus culturels et linguistiques sont nombreux dans un couple binational. Il faut pouvoir les dépasser. A contrario, c’est aussi enrichissant de découvrir l’autre, sa culture, et de voir combien nos réflexes culturels peuvent s’immiscer dans notre quotidien le plus intime. »

 « Antoine, 25 ans, Buenos Aires. »

La rédaction

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