Est-ce bien raisonnable de partir en vacances sur une île paradisiaque ?

Cette année, votre semaine de vacances, ce sera doigts de pieds en éventail, coraux à perte de vue et sieste à l’ombre des cocotiers. Après tout, quoi de plus délicieux après ces mois de réus, de rendus, de « J’suis dans le jus » que de vous la jouer repos absolu sur une plage déserte ? Mais avant de vous lancer dans cette folle épopée nonchalante, songez-y : est-ce bien raisonnable de passer ses vacances sur une île paradisiaque ?

 

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Jour 1. Vous arrivez dans la torpeur de votre île. Quelque chose ne tourne pas rond. Habitué(e) des voyages itinérants et des trajets à rallonge en bus bondé, vous vous sentez désespérément isolé(e). Aussi seul(e) que Robinson sans Vendredi. Bim, voilà que s’abat sur vous la déprime de l’insulaire. Vous vous ennuyez ferme sur votre serviette. Emporté(e) par la torpeur, bam, vous ne sentez pas tomber la noix de coco à 30 centimètres de votre visage. Le drame est évité de près.

Jour 2. Vous tapez « chute noix de coco » dans Google. Vous tombez sur un post « Question sérieuse relative aux chutes de noix de coco ». D’autres vacanciers ont eu la même frayeur que vous. Certains suggèrent le port du casque. Vous notez mentalement : désormais avant de vérifier si vos vaccins sont à jour, vous repenserez à cette statistique de globetrotteusedu47 aperçue sur le forum : chaque année, les chutes de noix de coco tuent en moyenne 150 personnes dans le monde, soit 15 fois plus que les attaques de requins. Une fois sur la plage, vous balancez cet argument de choc à la gueule de vos voisin(e)s entreprenants qui insistent pour poser leur serviette à côté de vous pendant la sieste. Et bim, dans vos gueules.

Jour 3. Galvanisé(e) par votre « near death experience », vous vous rendez compte que vous n’avez rien mangé depuis votre arrivée. Vous allez faire un tour dans l’unique supérette de l’île. Surprise, les prix ont doublé par rapport au continent. Vous achetez quand même un yaourt et un bout de cheddar pour le montant du PIB du Togo, que vous foncez dévorer sous le ventilateur de votre bungalow. Pas question de vous baigner après ça, il paraît qu’on peut mourir d’hydrocution.

 

Chaque année, les chutes de noix de coco tuent 150 personnes dans le monde

Jour 4. Au réveil, calé(e) dans votre hamac un bout de cheddar à la main, vous vous autorisez un petit tour sur Tinder, histoire de trouver de nouvelles denrées à vous mettre sous la dent. Après avoir consulté les trois uniques profils disponibles sur toute l’île, vous hésitez. Vaut-il mieux pencher pour le prof de plongée aux MST internationales, pour la standardiste de l’hôtel en mini short ou pour le gérant de la supérette histoire de choper des yaourts gratis ? Vous foncez piquer une tête pour réfléchir à tout ça.

Jour 5. À peine sortie de l’eau, une sirène assourdissante retentit. Vous plongez le nez dans votre méthode Assimil pour décrypter l’événement : un typhon débarque sur l’île. Vous partez vous mettre à l’abri dans l’école du coin. Serré(e) comme une sardine parmi les autochtones, vous découvrez que vous n’êtes pas si isolé(e) que ça. L’un d’eux, attendri par votre solitude, vous tend un panier de fruits exotiques. Vous savourez. Le prof de plongée aux yeux lubriques se serre un peu trop fort contre vous, vous savourez aussi, tant qu’à faire.

Jour 6 : vous vous réveillez chez Mike, le prof de plongée. Affamé(e) par votre seconde « near death experience », vous ouvrez son frigo sans conviction. Surprise : il est rempli de yaourts. Vous sortez sur la terrasse, une dizaine d’autochtones portent à votre cou des colliers de fleurs. Vous avez affronté votre premier typhon, vous êtes désormais l’un des leurs. Sur votre île du bout monde, vous voilà enfin comme un poisson dans l’eau. Demain, il faudra déjà repartir. Fini de buller.

 

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La rédaction

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