Les îles Lofoten. Le nom prête à sourire. On dirait celui d’un improbable groupe de métal allemand des années 1980. On pense à un possible hommage à Lofofora. Pourtant, les îles Lofoten, situées au nord du cercle polaire, n’ont rien d’un refuge de punks allemands biberonnés à la bière et aux guitares électriques. Au contraire : l’endroit est calme, reposant. Une ambiance de bout du monde flotte dans l’air. Et, malgré son isolement, l’archipel de 1227 km2 regorge de choses à faire.
Bordées à l’est par le Vestfjord, un bras de mer extrêmement poissonneux, et par la mer de Norvège à l’ouest, les îles sont surmontées de pics rocheux, allant jusqu’à 1146 mètres d’altitude. Depuis les crêtes, auxquelles on accède par de nombreux sentiers de randonnée, le panorama est à couper le souffle. Pendant l’hiver polaire, la nuit tombe tôt, dès 14 heures, parfois même avant, mais elle reste le moment idéal pour observer les aurores boréales. Les locaux sortent alors leur joli maillot de bain, un bon petit pack d’Arctic Beer – la bière locale – et contemplent le ciel, confortablement installés dans la chaleur de leur jacuzzi extérieur. Dès le mois de mai, tout bascule. Les jours s’allongent, jusqu’à se confondre avec la nuit. Après avoir vécu de longues semaines dans une obscurité presque totale, les habitants sortent de chez eux et profitent du soleil de minuit pour parcourir les nombreux sentiers de randonnée de l’archipel. On rêverait d’une aussi belle luminothérapie dans notre basse Europe. Certains en profitent pour faire du vélo, de l’escalade ou du kayak dans les bras de mer des fjords. Les plus téméraires vont même jusqu’à surfer en eaux froides, du côté d’Unstad.
À Unstad, on surfe à quelques mètres des baleines
D’ailleurs, « l’endroit est très prisé des locaux comme des surfeurs étrangers », explique Kristian, qui surfe à Unstad été comme hiver. Chaque année au mois d’octobre, le Lofoten Masters rassemble de nombreux surfeurs européens, venus affronter les breaks arctiques. L’été est la période la plus propice pour apprendre à se tenir sur une planche mais c’est l’hiver qu’il y a les plus grosses vagues. « Elles atteignent parfois cinq mètres à cette période là. Et même si on ne peut pas rester trop longtemps dans l’eau à cause du froid, on essaie d’en profiter au maximum. » Si Kristian passe outre cette mer à 10°C, aux effets bénéfiques évidents sur la circulation du sang, c’est parce que dans cette eau-là, les hommes et les animaux se côtoient. « C’est un des rares endroits dans le monde où l’on peut surfer à quelques mètres des baleines à bosse », confie le jeune homme. Plénitude. Jouissance. Tempérons tout de même le propos : rares sont les chanceux à avoir croisé les gigantesques mammifères entre deux vagues parfaites. Mais il est fréquent en revanche de rider à quelques mètres de bancs de phoques alanguis sur la berge. Et en fin de session, tout ce beau monde de bipèdes en combinaison gore-tex© déguste un petit sandwich à la morue, la spécialité locale.
Dans les Lofoten la morue est reine
Car comme dans tout haut-lieu de la pêche qui se respecte, le poisson est à l’honneur dans les îles Lofoten. Et ici, la morue est reine. C’est plus précisément le skrei, une variété de cabillaud migrateur pêchée de janvier à avril depuis des millénaires, qui règne sur l’archipel. Longtemps ramené en très grande quantité dans les ports de l’île, le skrei reste une source de revenus pour les locaux, mais sa pêche est aujourd’hui plus encadrée et mieux réglementée. Il n’empêche : malgré les quotas, la morue est encore consommée à toutes les sauces dans l’archipel. Elle se déguste en salade quand il fait chaud, grillée autour d’un barbecue, séchée à l’heure de l’apéro. Mieux : l’huile de son foie est consommée dès le petit-déjeuner pour donner des forces et bien préparer la journée. Haleine de phoque d’Unstad garantie.
Et pour les aficionados de la poiscaille, l’improbable et réjouissant championnat du monde de pêche au skrei a lieu chaque année au mois de mars et rassemble plusieurs dizaines de participants. À vos cirés, bande de punks.