Sri Lanka : Randonnée à Ella, petite perle des montagnes du centre

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  • 1/8 Rizières, Ella

  • 2/8 Le long de la voie ferrée, Ella

  • 3/8 Arrivée à Ella, Sri Lanka

  • 4/8 Paddy Field View, Ella

  • 5/8 Plantations de choux, Ella

  • 6/8 Ella, Sri Lanka

  • 7/8 Piments, Ella

  • 8/8 Rice and Curry, Ella

C’est en général debout, compressé, la tête dans un ventilateur timide, le bras dévissé pour s’agripper à un barreau, le cou tordu pour apercevoir les belles collines du centre du Sri Lanka, les oreilles saturées par le bruit des rails, en quelques mots le corps endolori par l’inimitable poésie des voyages en train, qu’on arrive à Ella. Fatigué mais heureux, heureux mais fatigué : choisissez. En sortant de la gare, faites durer le plaisir en évitant les nombreux rabatteurs qui vous proposent des chambres. Passez du tchou-tchou au tuk-tuk pour quelques minutes, le temps de rejoindre la Paddy Field View Guesthouse, à quelques centaines de mètres en contrebas de la ville.

 

Accrochée à flanc de montagne, cette petite pension de 8 chambres, tenue par une charmante famille, donne sur un paysage sublime de pentes cultivées, de montagnes à pic et de forêt tropicale, avec au fond l’Ella Gap, défilé abrupt menant aux plaines côtières du sud du Sri Lanka. On passerait des heures sur la terrasse commune, où la maîtresse de maison pourra vous servir un fastueux rice and curry maison, le plat national sri-lankais, mélange de riz et de tout un tas de petit bols de légumes variés dont certains arrachent pas mal. Petit bonus, la Paddy Field View se situe juste au départ d’un bel itinéraire de randonnée qui vous emmènera en quelques heures au sommet de l’Ella Rock, la grosse montagne qui lui fait face.

Pour vous y rendre, continuez sur le chemin devant la maison, celui qui s’enfonce au milieu de la végétation. Parmi les lianes et les énormes fruits jacquiers deux fois plus gros qu’eux, des singes jouent à cache-cache. Rangez vos BN© et vos panini trois fromages, car ces petits êtres mignons et facétieux sont aussi des morfales capables de venir vous les faucher sans aucun respect pour le patrimoine génétique commun. Quelques sentiers partent de-ci de-là. Restez sur celui qui a le moins l’air de conduire à une habitation. C’est léger comme indication, mais Gizèle va pas vous mâcher tout le travail non plus. Quand vous voyez, sur la droite du sentier, une volée de marches en béton, empruntez-les. Au bout de l’escalier, vous débouchez sur… oh, plaisir régressif ! la voie ferrée. Prenez à gauche sur les rails. Si comme la plupart des voyageurs, vous êtes arrivés de l’ouest, depuis Kandy ou Nuwara Eliya, c’était par ici.

Les trains étant rares, la voie fait office de chemin pour les écoliers en uniforme, les paysans en route vers leurs champs et les mères de famille chargées des denrées rapportées de la ville. Sur ses bords, quelques troquets, des vendeurs de fruits, et bien entendu des vaches qui regardent paisiblement passer tout ce petit monde. Traversez le pont : en contrebas sur la gauche, les carrés miroitants des rizières inondées en terrasse tapissent la vallée. N’hésitez pas à prendre l’un des chemins qui descendent pour vous approcher : les familles de paysans occupées à travailler la terre, à reformer avec les pieds les rigoles de boue pour l’irrigation, à repiquer le verdoyant paddy sous l’œil narquois des hérons, vous accueilleront avec le sourire.

 

Passez la gare de Kithalella sans faire deux minutes d’arrêt

 

Reprenez vos occupations de touriste occidental privilégié et conscient de l’être et, de retour sur la voie, continuez de faire le tchou-tchou un moment, passez la gare de Kithalella sans faire deux minutes d’arrêt et ne ratez pas, sur la gauche, le chemin avec la discrète indication vers Ella Rock.

Le chemin en terre, vous conduit le long des verdoyantes plantations de choux. Après, massez-vous les genoux, fini de faire joujou, ça va bientôt grimper sec sur les cailloux. Les premières pentes du Ella Rock se couvrent de plantations de thé méga-verdoyantes. Ca verdoie même franchement à fond, comme dans l’ensemble de la région montagneuse du centre du Sri Lanka, troisième producteur mondial de thé. Le chemin devient ensuite plus raide, de quoi piquer une bonne suée au curry, et s’engage dans une forêt aérée moins dépaysante, qui se transforme au fur et à mesure en un paisible bois d’eucalyptus. C’est la dernière ligne droite, les points de vue se dégagent sur la vallée et sur Ella. Enfin, on débouche au sommet du Ella Rock, souvent accueilli par un vendeur de thé, qui a flairé le filon touristique et doit désormais connaître le chemin par cœur. Les à-pics, vertigineux, permettent d’embrasser tout le paysage et offrent une vue gratifiante après l’effort.

 

Mais il y a mieux. Après être redescendus de la montagne, continuez jusqu’aux choux et suivez les panneaux indiquant « Waterfall ». Si vous vous perdez, n’hésitez pas à demander votre chemin aux villageois. Une courte descente vous emmènera au paradis, après le cagnard de la randonnée. Sur un aplomb rocheux posé face à la vallée d’Ella, une cascade fraîche comme un Water Bucket Challenge vous convaincra que France Gall avait raison : « Ella elle l’a, ce je n’sais quoi, que d’autres n’ont pas. Ou-ou-ou-ou ou-ou-ou… ».