SÉNÉGAL : ILE DE GORÉE, LA PILULE ANTI-DAKAR

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Pour le touriste lambda, Gorée, c’est l’île-musée incontournable, connue pour sa maison des esclaves et ses nombreux musées chargés d’histoire. Cette vision étriquée de l’île, véhiculée par le tourisme de masse et par de nombreux politiciens du globe, c’est un peu le baobab qui cache la forêt. Ne vous arrêtez pas là. Envoutés par ce passé un tantinet fabriqué, de nombreux touristes visitent pendant quelques heures ce que nombre d’entre eux appellent à tort « l’île mémoire », suivis et harcelés par les vendeurs ambulants. Ils passent à côté de l’essentiel : la vie quotidienne goréenne, unique en son genre.

Les habitants, souvent originaires d’autres régions du Sénégal ou d’autres parties du monde, ont pourtant un fort sentiment d’appartenance à leur île d’adoption. « L’île de Gorée est un petit paradis qui recèle de nombreux secrets. A condition de prendre le temps de la connaître et de l’apprivoiser », explique le directeur de la poste sur l’île qui se définit comme un « prêtre laïc ». Ce petit bout de terre parvenu au stade de symbole-suprême-de-la-traite-négrière ne mesure pourtant pas plus d’un kilomètre sur 300 mètres de large, si bien que l’on peut apercevoir l’océan des deux côtés, depuis la rue du Castel. Avec ses 2000 habitants, Gorée est un village dans Dakar, un arrondissement de la capitale aux antipodes de celle-ci, sans voiture ni bicyclette.

 

Gorée la flambeuse

 

Grâce à son histoire, ses eaux turquoise, ses maisons coloniales multicolores et ses bougainvilliers, Gorée est aussi courtisée aujourd’hui qu’elle l’était au XVème siècle. L’île fut en effet tour à tour sous domination portugaise, anglaise, hollandaise et française. « Inutile de voyager, affirme Badou. Ici, je fais le tour du monde sur place. » Les Goréens voient en effet affluer chaque jour des dizaines de touristes japonais, sud-africains ou finlandais.

Aujourd’hui, les colons bien-pensants ont été remplacés par des promoteurs immobiliers, des millionnaires en quête de tranquillité, des politiciens en manque d’inspiration, des touristes avides de connaissances sur l’esclavage et des vendeurs ambulants de Dakar à la recherche du client idéal. L’île peut paraître arrogante. Pourtant, dès que vous passez la porte de ces maisons coloniales guindées, vous découvrez des gens issus des classes populaires, loin des standards coloniaux. Une fois la nuit tombée et les envahisseurs à appareil photo dernier cri repartis, les Goréens reprennent possession de leur île. Ils vous invitent alors à palabrer et à boire le thé. Vous verrez, le peu de lits vacants sur l’île vous donnera, si vous y passez la nuit, le sentiment d’être privilégié.

 

Installez-vous chez Nono Burger pour déguster des fatayas, ces petits chaussons farcis

 

Enfin seul. Perdez-vous dans les innombrables petites ruelles qui quadrillent Gorée et laissez-vous porter au gré des rencontres. Attention toutefois à ne pas suivre n’importe quel poivrot de l’île. En journée, vous ne trouverez la paix qu’en dehors des plages et des sentiers battus, comme au Castel, la colline qui domine l’île. Sur l’un des versants, une falaise haute de 30 mètres se jette dans la mer. Vous apprendrez qu’un tunnel dans la roche permettait il y a peu de traverser l’île d’un bout à l’autre, qu’une famille tout entière habite encore dans un bunker caché sous le grand canon et qu’une autre vit sous terre, dans une maison aux allures de fourmilière. Là-haut, vous entendrez peut être de jeunes groupes de musique venus de Dakar pour répéter au calme et vos apercevrez le plus haut des baobabs : l’antenne électrique de l’île.

Au Castel, n’hésitez pas à demander la famille d’Oumou et de Mara qui produit l’un des meilleurs beurres de karité du monde, brassé avec de la pulpe d’aloe vera, et qui entretient un petit jardin botanique. En début ou fin de journée, certains spots sont idéals pour regarder la vie goréenne battre son plein : installez-vous chez Nono Burger pour déguster des fatayas, ces petits chaussons farcis à la viande. De là, regardez tranquillement l’île évoluer au gré des allers-retours des chaloupes. Postez-vous sous le grand baobab du village pour observer les jeunes jouer au football et délectez-vous des échanges entre le boulanger et les vendeurs de café. Au coucher du soleil, rendez-vous dans l’ancien palais du gouverneur désaffecté, d’où vous aurez une vue imprenable sur Dakar.

En restant quelques jours sur place, vous rencontrerez sans doute des rastas à la recherche d’une vie plus simple, dans l’attente du prochain sound system et des artistes reconnus – ou maudits, nombreux sur l’île. Vous comprendrez alors que Gorée a un côté mystique et qu’elle abrite de véritables personnages. Parfois aussi, elle est le refuge de quelques âmes perdues. A Gorée, de nombreux destins se croisent. L’île a une âme. N’y restez pas trop longtemps. Au risque, comme beaucoup avant vous, de vous laisser piéger par son charme enchanteur.

 

Destination : Sénégal | Rubrique : La Vie des autres

Tags : farniente - sénégal

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