Itinéraire : où partir après sa rupture ?

Il est 22h, votre désormais ex vient de quitter l’appartement avec pertes et fracas, valise en main, en vous disant que tout est fini. Sensation de vide, tristesse. Soupir. Menton tremblotant. Larmes. Vous pleurez beaucoup. C’est la phase numéro un de la rupture : vous êtes anéanti(e). Mais ce soir, Gizèle vous souffle une idée de génie : vous allez plaquer votre CDD payé au SMIC, lâcher votre studio de 20 m2 hors de prix et dire au revoir par téléphone à vos néoretraités de parents pour prendre un billet d’avion postrupture. Le but de ce tour du monde en cinq étapes ? L’oublier, revenir requinqué(e), rasséréné(e), bronzé(e), musclé(e) et même comblé(e) sexuellement. Gizèle vous file sa recette miracle en cinq destinations.

 

rupture étape 1

Il vous a fallu une semaine pour rassembler vos affaires et dire au revoir à vos potes, qui penchent désormais légèrement la tête quand ils vous voient, avant de vous demander dans un soupir, « Ça va toi ? ».  Vous n’avez même pas la force de répliquer. Vous répondez « non » à vos meilleurs potes et « oui » dans un faux sourire évident à vos connaissances. C’est le temps de la déprime. On pense à l’ex. Direction le Ghana, et plus précisément Kokrobite, le foyer rasta de ce petit pays à l’ouest de l’Afrique. Vous vous laissez pousser les cheveux en fumant joint sur joint, tranquillement posé(e) face à la mer. Vous ne vous lavez presque plus. À quoi bon ? Vous achetez un de ces pantalons bouffants à motifs d’éléphants. Vous écoutez du reggae. Vous vivez pieds nus. Vous avez de nouveau quinze ans. À défaut de la voir en rose, vous voyez la vie en vert-jaune-rouge. Un soir, comme Gizèle, vous rencontrez l’ami Courage Man Jah qui vous sort, entre deux lattes de bédo : « Mes enfants ne vont pas à l’école, ils ne jouent pas avec les enfants non-rastas. Ils fument tous, y compris le petit de 4 ans, et roulent leurs propres joints dans leur chambre ». Vient le temps de la prise de conscience. Vous avez beau être seul(e), sexuellement en jachère, et défoncé(e), votre désir d’enfant est intact. Vous voulez que Lou et Théodore fument des cigarettes en chocolat et portent court et propre le cheveu. Vous filez. Bye bye Kokrobite. (lire l’article)

 

rupture etape 2

Stop au bédo. Direction San Francisco. Vous n’avez plus d’appétit sexuel, mais vous débordez d’envie de bouffe. C’est l’étape : je me réfugie dans la nourriture. Nous sommes jeudi, et comme tous les jeudis à SF, c’est le soir d’Off the Grid, le rendez-vous hebdo des food trucks de la ville. Convaincu(e) – à tort – que l’absorption massive de mauvais gras vous fera oublier la peau douce et ferme de votre ex, vous vous jetez sur les galettes de maïs de Tacos Guys et vous commandez une deuxième crème brulée sauce bourbon. Vous arrosez tout ça de bières californiennes. Vous vous couchez à deux heures du mat’, ivre et fat. Vous dormez mal car vous n’avez plus vingt ans. Digestion difficile, cauchemar, vous rêvez que votre ex sort à moitié nu(e) d’un taco dégoulinant de guacamole. Vous vous réveillez en sueur. Il est temps de maigrir.  Ciao San Francisco. (lire l’article)

 

rupture etape 3

Vos potes sont inquiets. Ils n’ont plus de nouvelles de vous depuis deux semaines. L’un d’eux, le seul à être proprio d’un 50 m2 à Paris, en couple HEUREUX avec l’une de vos amies, prend une décision. Il vous paie un billet retour (remboursable quand vous irez mieux), avec une escale à Bruxelles. « C’est un excellent sas de décompression, tu verras. Puis il est temps de revenir maintenant, la fuite n’arrange rien dans ce genre de cas », vous affirment-ils, ces puceaux de la rupture. Vous pensez surtout à l’absorption massive de frites et de houblon que vous pourrez expérimenter dans la capitale belge. Vous vous souvenez de votre nuit d’angoisse à San Francisco. La vision d’un taco vous fait penser à votre ex. Vous devenez dingue. Vous renoncez à la double-cuisson mais pas à la bière. C’est l’étape : grosse teuf + trou noir. Direction les soirées Libertine Supersport de Bruxelles, temple de l’électro et de la fête. Arrivé(e)au Bloody Louis, la boite de nuit qui accueille l’événement, vous vous mettez à danser avec plein d’inconnu(e)s. Vous avez grossi, vous bougez un peu mal et vous transpirez le mauvais gras californien mais qu’importe, vous vous amusez quand même et c’est bien là le principal. Vous finissez par galocher un spécimen local dont le père a fait fortune dans les baraques à frites. Vous pensez à l’acte sexuel. Votre pantalon, autrefois si parfaitement coupé vous serre à la taille. Vous êtes ivre. Vous renoncez. C’est le début du bout du tunnel. Vous vous sentez pousser des ailes, merci Bruxelles. (lire l’article)

 

rupture etape 4

Vous cogitez. Il n’est pas encore tout à fait l’heure de rentrer en France. Fatigué(e) par vos péripéties précédentes, vous aspirez à plus de calme. Vous avez besoin de vous recentrer, de faire le vide, de « lâcher prise » comme dit le psy de votre sœur. C’est l’étape : réflexion et apaisement. Vous cauchemardez toujours. Fini le temps de l’ex dégoulinant de guacamole, vous vous rêvez svelte mais abandonné(e) au bord d’une nationale. Oublié(e) de tous. Il est temps de faire le point. Vous choisissez comme refuge à votre errance Nyksund, un petit village norvégien perdu au nord du cercle polaire. Là, à l’abri des regards, vous lisez Proust, Le Yoga pour les Nuls et la biographie de Mandela, emmitouflé(e) dans votre polaire Quechua. Déconnecté(e) du reste du monde, enfoncé(e) dans les fauteuils club de la chambre d’hôtes la plus perdue de l’humanité, vous vous demandez enfin ce qui n’allait pas dans votre couple. Vous comprenez soudain, entre deux visions de baleines à bosse et un thé au citron que vous n’étiez pas bien ensemble. Révélation. Vous vous jurez de mettre de l’eau dans votre vin. Vous grandissez. Cette nuit, malgré le soleil de minuit, vous rêvez que vous nagez au milieu des baleines. Sauf que le cachalot, c’est vous. Il est temps de vous reprendre en main. Bons baisers de Norway. (lire l’article)

 

rupture etape 5

Vous vous secouez. Froid(e) comme un fjord, gras(se) comme un phoque, mais serein(e) comme un yogi, vous vous extirpez des redifs nocturnes de Jurassic Park et Alerte à Malibu doublées en norvégien. Déclic dans votre inconscient : vous allez partir pour Hawaii, où Spielberg a tourné Jurassik Park, faire des treks dans la jungle avec les dinosaures et vous sculpter des pectoraux/hanches de sauveteur(se) américain(e). Trois jours d’avion plus tard, vous gagnez 40 degrés en débarquant à Kauai, la plus sauvage des îles de l’archipel hawaïen. Vous sifflez cul-sec un Mai Tai et serrez autour de votre crâne un collier de fleurs comme Rambo son bandana. C’est l’étape : je me respecte, je me dépasse et qu’il/elle se tape qui il/elle veut, moi je m’aime et ça me suffit. Escalade à mains nues du Waimea Canyon, surf dans les vagues déchaînées de la Polihale Beach, tout y passe. Au cours d’un trek de dix jours sans eau dans l’impénétrable forêt de l’ouest de l’île, vous faites deux rencontres : un T-Rex déchaîné et un groupe d’étudiant(e)s US en spring break forestier. Vous regardez le premier droit dans les yeux avec tellement de détermination qu’il se casse en couinant. Vous regardez les second(e)s droit dans les yeux avec tellement de détermination qu’ils/elles vous sautent dessus, en couinant aussi, pour un gangbang à faire tomber toutes les noix de coco. L’ego regonflé à bloc par votre stage de survie hawaïen, vous regrettez juste l’absence d’un miroir. Vous mesurez le chemin parcouru pendant la dernière étape de ce tour du monde postrupture. Vous avez affronté vos monstres, vous avez couché avec n’importe qui. Votre rupture est derrière vous, vous pouvez désormais rentrer en France et reprendre une vie sentimentale normale. Retour en selle, merci Gizèle. (lire l’article)

 

 

La rédaction

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